La petite ville de 5000 habitants prit une ampleur inhabituelle avec la présence du gouvernement de Vichy de septembre 1944 à avril 1945. En tant qu’ancienne ville de résidence princière, Sigmaringen disposait de bâtiments et locaux adaptés. Après la libération de Paris de 19 - 25 août 1944 Joachim de Ribbentrop, ministre des affaires étrangères avait donné l’ordre de déplacer le gouvernement de collaboration français de Vichy à Sigmaringen. La famille princière dut quitter le château en toute hâte. Philippe Pétain et ses ministres furent installés au château et bien ravitaillés. Une partie du gouvernement (dont Pétain) refusa d’exercer ses fonctions, une autre partie continua de collaborer avec les nazis. De nombreux civils français, collaborationnistes, suivirent le gouvernement de Vichy dans son exil de peur des représailles. La ville tripla son nombre d’habitants. La veille de l’entrée des troupes du Général Jean de Lattre de Tassigny dans Sigmaringen, les collabos et membres du gouvernement avaient fui la ville. Sigmaringen passa sous occupation des troupes françaises. Après des débuts difficiles pour la population, les prémices d’un rapprochement franco-allemand se dessinèrent, grâce à la promotion des arts et de la culture après 12 ans de dictature. En 1952 fut fondé le Land de Baden-Württemberg.
Cette période représente pour les deux pays une lourde hypothèque sur leur histoire commune. C’est peut-être pour cela que cette période est assez méconnue aussi bien en Allemagne qu’en France. Sigmaringen est cependant tout comme Verdun, Reims ou bien Aix-la-Chapelle ou Versailles, un lieu de souvenir franco-allemand dans l’esprit de Pierre Nora et Etienne François. On retrouve ici les antécédents douloureux et les tensions que le traité de l‘Élysée a tenté de résoudre.
75 ans après, le temps est venu d'intégrer les différentes perspectives sur les événements de l'hiver 1944/1945 dans une vision commune de l'histoire qui puisse servir de base pour une discussion ouverte, discussion elle-même fondamentale dans l’optique d’un futur commun paisible et digne de l’esprit européen.